Georges BElbenoît, une haute idée du sport (1918 - 1999)
Président de l'UFOLEP-USEP
Qui était Georges Belbenoît ? Qui habitait cette grande silhouette, un peu raide (ici à droite) ? “ Un grand bonhomme ”, répondent ceux qui l’on connu.
Et d'ajouter : “ En 70 ans d’histoire de notre mouvement, c’est certainement le personnage qui l’a le plus marqué. Par son charisme, par ses idées, par l’élan qu’il lui a donné. ” Georges Belbenoît ne fut pourtant président de l’Ufolep-Usep que durant six années, de 1970 à 1976.
Prisonnier de guerre en 40
Georges Belbenoît était né le 27 octobre 1918 à Andrésy (Yvelines), où sa mère était institutrice. Sa famille s’installe plus tard à Neuville-sur- Saône. Après l’école communale, en bon fils d’instits il poursuit ses études au lycée, à Saint-Rambert et à Lyon. Après deux ans de préparation seulement, il entre en 1937 à l’Ecole Normale Supé rieure. On le destine aux langues celtiques, il se dépense en poursuivant tout ce qui de près ou de loin ressemble à un ballon. Mais la guerre l’empêche d’achever sa scolarité rue d’Ulm. Incorporé en septembre 1939, il est fait prisonnier le 17 juin 1940.
Libéré, Georges Belbenoît passe avec succès, en décembre 1945, son diplôme d’études supérieures et l’agrégation de lettres. Le goût du sport ne l’a pas quitté. Pour preuve, le sujet du mémoire de son diplôme : “ L’éducation morale et plus particulièrement sportive dans l’enseignement secondaire ”. Georges Belbenoît passe l’année 1946-47 comme lecteur à la Colombia University de New York. Assistant au Teatcher’s College, il s’attache à étudier les méthodes et moyens de travail de l’éducation physique. A son retour en France, il s’interroge : sport ou université ? L’université l’emporte, et la cause du sport à l’école aussi.
Président de l’Ufolep-Usep
Professeur de lettres au lycée de Douai en 1947, censeur à Bourges en 1953, proviseur à Lorient puis à Metz, il devient en 1960 inspecteur d’académie à Alençon, puis dans les Bouches-du-Rhône. C’est là que sa route croise vraiment celle de l’Ufolep-Usep, même si une amitié plus ancienne le liait à Raymond Boisset, autre grande figure du mouvement. Président départemental de l'Usep, il accueille en 1965 les participants du XXVIIème stage national Usep à Boulouris (Var).
En 1969, il devient inspecteur général de l’instruction publique peu après avoir été élu au Comité directeur de l’Ufolep. Enfin, en mars 1970, il est élu président de l’Ufolep-Usep à l’unanimité du Comité directeur lors du stage national de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique). Georges Belbenoît devient même le premier président du mouvement : Georges Delvaux, à qui il succède, n’avait que le titre de Commissaire général.
A Saint-Nazaire, Georges Belbenoît impressionna son auditoire par la qualité de son rapport sur “ La place de l’Ufolep dans l’animation socio culturelle du groupe ’’. Par la suite il livrera plusieurs réflexions théoriques qui feront référence : “ Unité du sport, unité de l’éducation (permanente) ” (IUU n°100, mai 1976), ou encore “ L’école et l’Usep demain ” (revue EPS, n° 200, octobre 1986), qui reste encore aujourd’hui le texte de base distribué à tout nouveau militant Usep. Geor ges Belbenoît avait même publié un ouvrage : “ Le sport à l’école, renouveau de l’éducation ” (Casterman, 1972).
Au sein des diverses instances de l’Ufolep-Usep, Geor ges Belbenoît était également l’homme providentiel qui clarifiait les débats ou réussissait à faire la synthèse d’un texte trop brouillon ou emberlificoté. En trois coups de crayon, il dénouait le nœud gordien. Et permettait parfois à des stagiaires aux yeux rougis de s’abandonner l’esprit léger à un sommeil répara teur...
Disponibilité et humilité
Cette aisance intellectuelle s’accompagnait d’une grande disponibilité. Humilité, modestie, discrétion sont les mots qui reviennent dans tous les témoignages. “ Son intelligence laissait une très grande place à l’intelligence du cœur ”, résume l’un de ceux qui l’ont côtoyé. Georges Belbenoît montra aussi un réel courage militant à une époque où le contexte politique n’y était pas favorable. D’ailleurs, les pressions du pouvoir ne furent sans doute pas étrangères à sa décision de démissionner début 76, laissant à Maurice Daniel le soin de lui succéder. Enfin, sur le plan personnel, Georges Belbenoît ne fut pas épargné par les malheurs. Le suicide de sa fille, âgée de 23 ans, brisa sa femme, qui devait mourir d’une longue maladie. Il vécut ensuite ses dernières années à Nice.
Le dernier acte militant de Georges Belbenoît fut son intervention à l’Université sportive de l’Ufolep-Usep de juillet 1996. Invité à résumer quatre jours de débats consacrés au sport et à l’insertion des jeunes, il avait évoqué les “ dénonciations virulentes ” des “ turpitudes ” du sport moderne. “ C’est ainsi que, probablement, nous pourrons progresser ou faire progresser une autre idée du sport débarrassée de nombre de scories et autres vices, autre idée du sport adaptée aux besoins de ce temps et de l’insertion sociale des jeunes. ” Une conclusion qui aujourd’hui prend valeur d’épitaphe.
Témoignages : Georges Belbenoît par ceux qui l'ont connu
Marc Derive, président de l’Ufolep-Usep, a gardé de Georges Belbenoît, l’un de ses prédécesseurs dans sa charge, le souvenir d’un militant qui s’est intéressé jusqu’au bout au mouvement. Et qui possédait le sens de la formule.
« Dans une lettre qu’il m’avait adressée en juin 1998 après avoir lu dans IUU le discours de clôture de l'Assemblée générale de Nevers, Georges Belbenoît commentait ma “ harangue ” en me souhaitant très amicalement de rester “ longtemps encore un Sysiphe heureux, l’espoir étant ténu de voir un jour le rocher durablement au sommet “ Plus ça change et plus c’est la même chose ”, écrivait- il aussi un peu plus loin au sujet des “ carences de la communication et de leurs causes multiples ”. Il n’en demeurait pas moins philosophe et trouvait que “ finalement, pour l’essentiel l’Ufolep et l’Usep ne se portent pas si mal ; grâces en soient rendues à leurs militants, animateurs et dirigeants ”. Des paroles pleines de sagesse qui me rendaient plus sensible encore à ses encouragements et à ses marques d’amitié. »
Instituteur, militant Usep puis Ufolep après sa re traite, Max Albinet a bien connu Georges Belbenoît, qui fut son inspecteur d’académie avant de devenir son ami.
« J’ai rencontré Georges Belbenoît à son arrivée dans les Bouches-du- Rhône. J’étais alors instituteur et militant Usep dans mon petit village de Plan d’Orgon, et j’ai été frappé qu’un inspecteur d’académie se mette immédiatement en relation avec l’Usep départementale. Il nous apportait son soutien total, facilitait le remplacement des instituteurs en formation, était présent à tous les stages départementaux.
Il a également permis la transformation de la traditionnelle Fête du stade, à Marseille, en lendit, lui donnant une tout autre ampleur. Surtout, il a défendu et développé les lendits dans tout le département, faisant en sorte qu’ils deviennent des manifestations intelligentes, des supports péda gogiques sur lesquels les enfants travaillent toute l’année.
A titre personnel, je me souviens tout particulièrement du stage national Usep de Boulouris, en 1965. Cette année-là, Henri Gauthier, qui était en quelque sorte le premier instituteur à mi-temps, a présenté l’expérience d’horaires aménagés et d’activités sportives quotidiennes menée dans son école de Marçay (Vienne). Geor ges Belbenoît, qui était très à l’écoute des innovations pédagogiques, est alors venu me voir et m’a demandé : “ Ça vous tente ? Allez-y, je vous soutiens. Et ça s’est mis en place dans mon école dès l’année suivante. Par la suite, il est parti à Paris, mais il était toujours présent aux regroupements des cadres nationaux Usep, à Châtenay-Malabry. Et il s’y montrait, comme à son habitude, d’une disponibilité étonnante.
A la fin de sa vie il habitait Nice, aussi je le voyais de temps en temps. Il était toujours avide d’informations sur la vie du mouvement. Ainsi, quand de retour du congrès de Chambéry je lui ai fait part des velléités d’indépendance de l’Usep, il m’a dit : “ Ce serait la pire des choses Si c’était un partisan convaincu de l’Usep, et notamment de la place de l’Usep hors temps scolaire, Georges Belbenoît était aussi un grand défenseur de l’unicité de l’Ufolep-Usep. »