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l'Elu militant

Gérard Barc, administrateur à la Ligue de l'enseignement

Depuis près de 50 ans, Gérard Barc multiplie les projets associatifs au sein de la Ligue de l’enseignement de la Vienne. Devenu conseiller général et maire de son village de Vouneuil-sur-Vienne, il s’engage aujourd’hui pour faire vivre son territoire. Rencontre avec un homme de terrain et de terroir.

Gérard Barc se définit comme un « militant associatif à vie ». Un engagement tellement « fort et ancré », ditil, qu’il prime sur un parcours politique qui a pourtant fait de lui l’une des figures majeures de la scène politique de la Vienne. Et qui a placé cet élu local jamais défait lors d’une élection, successivement élu et réélu depuis 20 ans conseiller général (PS) puis maire de son village de Vouneuil-sur-Vienne, dans une trajectoire, à en croire ses amis politiques, de futur sénateur. « Aléatoire et souvent très violente, la vie politique peut s’interrompre brutalement, justifie-t-il. Alors que je resterai pour toujours un acteur du monde associatif. » Deux engagements qui « se cumulent et se complètent ».

Il faut dire que Gérard Barc, 64 ans, instituteur de formation, multiplie depuis près d’un demi-siècle les responsabilités associatives, tour à tour président du foyer des jeunes de son village, responsable des parents d’élèves, créateur d’événements culturels, fondateur d’une association d’insertion, secrétaire général de la Ligue de l’enseignement au niveau départemental puis régional et aujourd’hui administrateur de la Ligue nationale. Entre autres engagements d’une liste longue comme le bras, salués tout à la fois par les Palmes académiques, l’Ordre national du mérite et la médaille d’argent Jeunesse et sport.

Lorsqu’il bat la campagne électorale, Gérard Barc est de ces hommes politiques aguerris au verbe haut, costume sombre et barbe poivre et sel soigneusement taillée, regard vif et charisme évident. Une image qui n’a pas toujours été aussi travaillée. Ainsi, dans un article publié dans les années 1970 par la presse locale et resurgit du passé par la magie d’Internet, Gérard Barc, alors tout nouveau secrétaire général de la Ligue de l’enseignement de la Vienne, apparaît les cheveux longs et rebelles et la barbe imposante. Mais si le look a évolué, les certitudes demeurent. « Je n’ai jamais changé sur le fond, affirme-t-il. Et la politique n’est que la suite logique de mes responsabilités associatives. »

Repéré par un inspecteur jeunesse et sport

Pour comprendre le parcours et la force des convictions de ce père de famille (trois enfants et quatre petits-enfants), peut-être faut-il remonter à son adolescence où il s’investit pour faire vivre le foyer des jeunes de son village natal de Croutelle, dans la Vienne, un département qu’il n’a jamais quitté. « J’ai été formé par un instituteur de l’école publique qui a su me faire découvrir et m’accompagner dans la vie associative », raconte-t-il. Lui-même devient instituteur, poussé par un père épicier soucieux d’assurer l’avenir de ses enfants : « Mon père nous a dirigés, mon frère et moi, vers l’École normale parce que les études et la pension étaient gratuites et que nous aurions ainsi un métier solide. »

Au foyer de Croutelle, Gérard Barc multiplie les animations sportives et culturelles dans une double dimension collective et éducative qu’il juge, aujourd’hui encore, « indispensable à l’épanouissement des jeunes ». Le leadership et la vitalité contagieuse du responsable du foyer sont repérés par un inspecteur jeunesse et sport. Et, après seulement une année comme instituteur, Gérard Barc se met à la disposition de la Ligue de l’enseignement. Il a 22 ans. Le début d’une carrière professionnelle entièrement dédiée à l’éducation populaire.

« L’école, la formation continue et l’éducation populaire sont les trois piliers de la construction de l’individu », analyse Gérard Barc. À l’heure d’Internet et de « l’omniprésence des médias qui formatent l’esprit des gens », il faut, insiste-t-il, retrouver des lieux collectifs où les gens, jeunes ou moins jeunes, se rencontrent, échangent et apprennent. « La relation humaine directe est essentielle, résume-t-il. Elle a toujours guidé mon action. » Dans le parcours de Gérard Barc, cette action, foisonnante, se décline successivement en événements culturels, avec la création d’un groupe folklorique chargé de porter la tradition paysanne de la Vienne via des spectacles vivants et itinérants. Puis en culture scientifique, avec la naissance de Pop’Physique, un congrès scientifique organisé à Poitiers qui attire, dans les années 1970, des pointures telles que Haroun Tazieff ou le directeur de la Nasa. Ou encore en manifestations sportives, camps de vacances et rencontres intercommunales. Autant de projets voulus pour renforcer un « vivre ensemble » parfois distendu dans les très rurales contrées de la Vienne.

Dans les années 1990, devenu conseiller général et élu municipal, Gérard Barc fonde l’association Action-emploi, coiffant son expérience associative de sa casquette d’élu local. L’objectif : insérer par l’emploi des personnes qui en sont éloignées. À l’échelle du canton de Vouneuil-sur-Vienne et de ses 11 000 habitants, l’association met en relation entreprises à la recherche de main-d’œuvre et demandeurs d’emploi dans des secteurs aussi divers que la garde d’enfants, le secrétariat administratif ou les services à domicile.

Et ça marche puisque cette initiative locale, qui préfigure les démarches d’économie sociale et solidaire, permet chaque année, à plusieurs dizaines de personnes, de retrouver une activité. « Je crois à l’ancrage dans un territoire, confie Gérard Barc. Ma région subit de plein fouet la crise économique. Les associations locales et les projets à petite échelle nous permettront de redresser la tête. » Parce que ces acteurs locaux, souvent portés par des bénévoles militants, permettent d’individualiser les parcours et de faciliter l’insertion par le travail. Une action de proximité parfois plus efficace, à en croire Gérard Barc, qu’une politique nationale décidée à Paris.

« Un pied dans le local »

Gérard Barc se décrit comme un élu de terrain. S’il est devenu l’un des chefs de file de la gauche dans la Vienne, il n’est pas, semble-t-il, de ces hommes d’appareil et de coulisses, de ces élus de l’ombre qui dans l’entourage des ténors politiques aspirent à la lumière. « Seule la gouvernance locale m’intéresse, assure-t-il, et non les responsabilités au sein du Parti socialiste. » Un parti dont parfois il se détache, comme lorsqu’il estime qu’un élu national doit garder « un pied dans le local » pour mieux mesurer la réalité du terrain, alors que le PS souhaite instaurer le non-cumul des mandats. L’ancrage territorial, encore et toujours.

Peut-on conjuguer tout à la fois parcours associatif, investissement politique et vie de famille ? « J’ai souvent passé des soirées entières loin de la maison pour monter des projets ou participer à des réunions politiques, sourit le maire de Vouneuil-sur-Vienne. Ma famille m’a suivi parce que je suis parvenu à l’impliquer dans mes actions. » Ses trois enfants reprennent aujourd’hui le flambeau de l’engagement public : l’une est maire adjointe et conseillère générale de Poitiers, un autre est élu municipal et le troisième militant associatif. Sûrement Gérard Barc leur a-t-il transmis un peu des convictions qui depuis un demi-siècle guident son parcours : « L’éducation populaire permet de former des citoyens et de comprendre le monde. Et l’action publique d’agir, à son échelle, pour tenter de l’améliorer. »

Sylvain HENRY

Les autrEs portraits autour de la LaïcItÉ

  • Ferdinand Buisson

    1841 - 1932

    Président de la Ligue de l'enseignement

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  • Sabine Baudont, la laïcité sur le terrain

    Responsable culturelle de la Ligue de l’enseignement d’Ille-et-Vilaine

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  • Albert Bayet, défenseur de l'école laïque

    1880 - 1961

    PRÉSIDENT DE LA LIGUE DE L’ENSEIGNEMENT DE 1945 À 1959

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  • « Sortir de sa réserve » au nom des valeurs républicaines

    Charles-Denis Lévy Soussan, administrateur de la Ligue de l’enseignement de l’Isère, au sein de la nouvelle Réserve citoyenne de l’Éducation nationale.

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  • Jean Macé, le républicain militant

    1815 - 1894

    Fondateur de la Ligue de l'enseignement

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  • Edouard Petit, la vie associative ou « le cadre même de la jeune démocratie qui s’organise »

    1858 - 1917

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  • Philippe Moscarola, "miroir de l'intégration"

    Responsable culturel de la Ligue de l’enseignement de Savoie

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  • « L’éducation populaire doit former des citoyens éclairés et tisser des liens de proximité dans tous les territoires.»

    Anne-Marie Franchi, ancienne vice-présidente de la Ligue de l’enseignement

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